De la théorie à la pratique !

Se laisser guider…
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A Bassac, en Charente, Elodie exprime la nécessité de pratiquer dans sa réalité.

Membre du Reiyukai depuis 7ans, je me heurte à une relation très douloureuse avec mon beau-fils. Je vois ma dureté de cœur et le pouvoir que j’exerce sur ce jeune garçon, le même que celui qu’ont exercé mes parents sur moi, enfant. J’entends de mes aînés que c’est une relation de progrès et j’ai le projet de résoudre cet obstacle pour sortir de cet enfer!
L’année dernière, j’ai rencontré une situation professionnelle extrêmement difficile, pendant des mois. J’ai d’abord réagi de manière ordinaire, en refusant la réalité et en mettant tout en œuvre pour essayer de comprendre, de rationaliser, de faire entendre la justice et d’apaiser les tensions au sein des équipes. Mais la situation ne faisait que se tendre davantage et empirer. A nouveau j’avais sous les yeux les mêmes informations : manque de considération et de respect, dureté de cœur, ego. Cette situation a engendré beaucoup de souffrances physiques et psychologiques. J’ai fini par craquer au point d’accepter de m’arrêter de travailler pour la première fois en 16 ans (j’ai toujours vu et entendu mes ancêtres se tuer au travail). C’était un grand dépassement pour moi. Cependant, je vivais cet arrêt comme un terrible échec, j’avais honte et très peur. A ma grande surprise, j’ai alors entendu des félicitations de mes aînés qui m’ont exprimé que c’était au contraire un progrès d’accepter enfin la réalité, et que s’ouvrait à moi un vaste terrain d’expérimentation, de transformation et de progrès. J’ai entendu clairement que nous ne sommes pas victimes de notre réalité, et que toute situation que nous rencontrons est d’abord liée à notre qualité d’esprit. J’ai compris que cette situation extrême m’offrait toutes les informations dont j’avais besoin à ce moment pour progresser. Il était temps de me mettre aux « travaux pratiques », de remettre en cause la qualité de mon esprit de pratique.
Pendant cet arrêt, j’ai transféré dans l’espace de la pratique toute l’énergie que je mettais habituellement dans mon travail. S’est ouverte une période de pratique intense et vivante, étonnamment joyeuse. J’ai exprimé lors de la récitation du Soutra un regret sincère de mes limites et de ce que je générais, et demandé à développer de l’humilité et le désir d’apprendre pour nettoyer les causes profondes de mes souffrances. J’ai aspiré à prendre un rôle large pour les autres, le rôle spirituel qui est le mien dans cette vie. La réalité a alors bougé : j’ai reçu une nouvelle compagne, j’ai vu des compagnons se remettre à la pratique et prendre leur rôle d’aîné. J’ai continué à prendre part à l’organisation des réunions régionales en Suisse et j’ai accueilli là aussi plusieurs nouveaux compagnons. Je me suis également impliquée concrètement auprès des compagnons de mon conjoint avec qui je construis un cercle, et j’ai créé des relations proches et confiantes d’une qualité nouvelle.
C’est à cette période également que s’est concrétisé un projet auquel je tenais : prendre des billets pour aller au Canada chez la cousine de mon conjoint à qui je souhaitais transmettre l’Enseignement. Je l’avais rencontrée l’année dernière et sa réalité de maman d’une grande enfant autiste m’avait touchée. Je suis partie sans attente, mais avec le souhait d’apprendre. Immédiatement cette cousine s’est montrée curieuse et a souhaité réciter le Soutra pour ses ancêtres. Mais j’ai retrouvé chez elle la même dureté de cœur, la même exigence, le même manque de considération pour ses proches que moi ainsi que le pouvoir qu’elle exerçait sur tout et tout le monde pour que la réalité corresponde à ses attentes. J’ai vu les souffrances engendrées par cette attitude. Je n’ai jamais rien dit mais, à chaque moment, j’ai corrigé mon esprit. Nous avons observé que ces aspects très présents s’effaçaient après la récitation commune du Soutra, portée par un souhait sincère de remise en cause, pour laisser place à des journées très sincères et joyeuses. Au fil de ces récitations, non seulement la relation à ses filles a changé mais leur réalité s’est modifiée : la plus jeune devenait plus vivante, joyeuse, moins en fuite et davantage en lien, capable de prendre sa place dans le groupe. L’aînée, qui souffre de troubles sévères de la communication et n’avait pu quitter sa chambre, pas même pour s’alimenter, est venue d’elle-même nous rejoindre le dernier jour, au milieu de la récitation, pour lire le Soutra ! Elle s’est ensuite mise en lien avec notre jeune enfant toute la soirée ! Nous avons été témoin de la puissance de l’Enseignement : c’était merveilleux !
Mais dès mon retour en France, j’ai retrouvé les mêmes obstacles dans ma vie familiale. Le lien entre les enfants de ma cousine et celui de mon compagnon nous avait sauté aux yeux. C’était donc possible de transformer la relation à mon beau-fils ! J’ai repris mes « travaux pratiques » devant cette réalité très concrète. J’ai à nouveau regretté mes obstacles, j’ai demandé à recevoir la capacité à nettoyer et à résoudre les racines profondes de cet héritage ancestral et je me suis tournée vers ma famille de pratique. Grâce à mes compagnons et à mes nouveaux collègues de travail, je reçois toutes les informations dont j’ai besoin pour ma transformation. Ce sont autant d’encouragements ! En quelques semaines nous avons déjà constaté une qualité de relation absolument nouvelle et très encourageante au sein de notre famille, avec mon beau-fils notamment, et dans mon nouveau lieu de travail. Je vérifie ce que j’ai souvent entendu : on progresse en dehors de nos idées.

Elodie