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« Je n’y arriverai jamais !»

Voilà ce que j’ai pensé lorsque j’ai commencé à pratiquer il y a cinq ans. « C’est une secte, m’a dit ma mère, tu t’enfermes dans un groupe, tu devrais arrêter ». Jusque-là, j’avais très souvent suivi ses conseils : son avis était celui qui comptait le plus pour moi, surtout quand il était dicté par sa peur. Je lui obéissais alors comme une petite fille, convaincue que, de toute façon, elle savait mieux que moi ce qui était bon pour moi. Pourtant, peut-être pour la première fois de ma vie, cette fois-là j’ai refusé de me laisser guider par sa peur. Étonnamment, au risque de la décevoir, j’ai continué à pratiquer. J’étais très motivée par le lien d’amitié que je voyais se créer avec Isabelle, mon aînée, mais aussi avec les autres membres de Reiyukai, en particulier les jeunes. J’avais l’impression de retrouver, à travers ces amitiés, un état que je n’avais pas vécu depuis l’enfance. Je redevenais absolument moi-même, transparente dans mes intentions et mes émotions, libérée de mes pensées imprégnées de peur. J’ai donc continué à suivre la méthode en récitant le Soutra parfois seule, parfois avec ma famille de pratique, ou avec les jeunes. Je suis allée aux réunions et séminaires et j’ai entendu des expériences qui m’ont profondément touchée. J’ai alors senti une confiance grandissante dans le monde spirituel et une invitation intérieure à m’ouvrir aux autres, en accueillant la réalité qui se présentait à moi.

Une découverte inattendue et éclairante

Je me suis encore dit : «je n’y arriverai jamais » lorsque, deux ans après avoir commencé la pratique, j’ai commencé à voir très clairement les pensées anxiogènes et limitées qui polluent au quotidien mes parents et les autres membres de ma famille, et qui les empêchent d’ouvrir leur cœur aux autres. Par exemple, j’ai vu qu’au lieu d’accepter leur souffrance, due à des causes qu’ils ne comprennent pas, ils préféraient chercher un coupable à cette souffrance. En parallèle, au fil de mes actions de pratique, j’ai vécu des expériences étonnantes avec les membres de ma famille. Un après-midi, alors que j’avais moi-même tendance à rendre ma mère responsable des blessures qui m’handicapent aujourd’hui, ma grand-mère a sorti des vieilles photos et mes deux grands-parents m’ont raconté des histoires sur leur fille, ma mère. J’ai alors découvert qui elle était réellement : une enfant lumineuse, un vrai petit soleil, toujours souriante et pleine d’énergie, qui fait rire les gens, qui chante, qui joue et profite de l’instant présent en rayonnant tellement fort que moi, sa fille, en suis vite devenue dépendante. Je me suis alors rendu compte que je m’étais très souvent cachée dans son ombre comme pour me protéger, m’empêchant alors de rayonner moi-même ! J’ai aussi pris conscience que je reproduisais ce schéma dans mes amitiés féminines, en choisissant des amies au tempérament fort derrière qui me cacher, et dans mes relations de couple, ce qui me rendait très dépendante de l’autre. J’ai vraiment remercié de tout cœur le monde spirituel de m’avoir donné l’occasion de faire ces découvertes sur moi-même car, en comprenant qui j’étais réellement, je pouvais enfin décider de fonctionner autrement.

La création d’une amitié profonde

En septembre 2018, une de mes connaissances, Marina, est venue à un séminaire sur mon invitation et a installé une plaquette ancestrale chez elle. Très rapidement, un peu effrayée à l’idée de « partager » ce chemin avec quelqu’un pour la première fois, le leitmotiv : « je n’y arriverai jamais » a refait surface. Un jour, devant mon autel, alors que je me sentais complètement perdue, que je ne trouvais plus de sens à cette pratique, j’ai ressenti très fortement à l’intérieur de mon cœur qu’on me disait « Arrête ». J’ai tout de suite interprété cela comme « arrête de pratiquer ». J’ai diminué les actions de pratique que j’avais l’habitude de faire, sans vraiment couper ce lien invisible tellement profond et indéniable avec l’Enseignement. J’ai conservé le lien d’amitié avec mon aînée qui m’encourageait toujours et qui m’a dit un jour « Tu sais, je t’aimerai toujours, même si tu arrêtes de pratiquer », ce qui a énormément adouci tout mon être. J’ai alors commencé à me mettre en lien avec Marina, nous avons beaucoup échangé, nous nous sommes encouragées mutuellement, nous avons appris ensemble comment fonctionne un être humain dans toutes ses dimensions. Cela nous a beaucoup rapprochées et permis de créer une amitié profonde, avec le but commun de nous réaliser nous-mêmes.

Une épreuve familiale

Parallèlement, dans ma famille, une de mes cousines âgée de trente-neuf ans atteinte d’un cancer a vu son état se dégrader au début de l’été dernier. Je me suis alors efforcée d’écouter ma famille en peine face à cette épreuve, surtout ma mère, et de soutenir ma cousine malade même si je me sentais malheureusement impuissante. Cet été, alors que je passais un weekend avec Marina, ma mère m’a téléphoné et nous avons eu un échange comme jamais nous n’en avions eu jusque-là dans ma vie. Elle m’a déclaré : « Je vois tout ce que tu fais pour les gens à travers ta pratique, je te trouve très épanouie et je suis fière de toi ». Cette phrase, entendue de la bouche de ma maman pour la première fois de ma vie, a instantanément fait fondre mon cœur et j’ai pleuré de joie !

Depuis ma cousine est décédée, cela a été difficile pour nous tous. Certaines personnes de ma famille cherchent encore des coupables à punir. Je vois que ma mère n’agit plus ainsi. Elle accompagne simplement les parents de ma cousine avec tout son cœur. Depuis, Marina m’a annoncé avoir senti son propre lien avec sa famille suite à la suite d’une récitation du Soutra. Cette nouvelle pratique avec une compagne me fait encore parfois me dire : « je n’y arriverai jamais », mais j’ai de plus en plus de facilité à franchir cette barrière mentale lorsque je regarde ce qui a été construit dans mon cœur et dans celui de ma famille depuis le début de ma pratique.

Lucie