Mettre l’Enseignement en pratique dans notre réalité

Pratiquants sur «le Chemin de l’amitié spirituelle », les membres du Reiyukai nourrissent leur pratique d’échanges et de questions. Que veut dire, par exemple, l’expression « pratiquer dans la réalité » ?

Claudine Shinoda fournit ici quelques explications.

Cette expression « pratiquer dans la réalité » signifie pour nous « mettre l’Enseignement en pratique dans la réalité », ou encore « faire vivre l’Enseignement dans la réalité ». Le sens en est donc vaste et complexe, et je vais tenter d’expliquer en quoi, selon moi, cela consiste.

Afin de pouvoir mettre en pratique l’enseignement dans la réalité, il faut, en tout premier lieu, bien entendre l’Enseignement dont il s’agit, ce qui n’est pas si évident que cela paraît mais un vrai challenge qui nécessitera des efforts d’humilité, d’ouverture, de concentration.

Il est donc d’abord nécessaire de créer en soi la capacité à entendre l’enseignement du Reiyukai et du Soutra du Lotus, et ses principes fondamentaux. On développe cette capacité en se reliant au Soutra par la récitation, aux aînés de pratique -afin d’éviter des interprétations erronées et précoces-, aux réunions pour entendre les expériences de réalisation de l’Enseignement et réentendre sans cesse la méthode.

Cependant les actions que je viens d’évoquer et qui doivent toujours rester les bases de notre pratique personnelle n’en sont que les prémices. Au-delà de ces premières actions de base indispensables qui consistent donc à créer des liens de confiance solides avec cet enseignement et « le sangha », la communauté des personnes qui le mettent en pratique -, il nous appartient d’expérimenter nous-mêmes, de vérifier, de valider les enseignements entendus ou lus dans le Soutra. Cette expérimentation directe se réalise de manière concomitante aux efforts pour bien entendre l’Enseignement et se relier à son monde.

Pour parvenir à ce but de découvrir l’enseignement au sein du réel, nous cultivons, au moment de notre récitation, l’aspiration et la détermination à entrer dans ce monde vivant, en élargissant ce vœu à nos ancêtres, aux membres de notre famille et à tous les êtres qui ont un lien avec nous. Sans autres efforts particuliers, nous recevons les preuves que notre demande a été entendue à travers des changements étonnants de la réalité et à travers des circonstances et des relations qui nous permettront de perfectionner notre humanité, de nous transformer, de purifier l’héritage karmique que nous avons reçu de nos parents et de nos ancêtres. Nous constaterons par nous-mêmes que la réalisation de l’Enseignement prend vie dans le réel, à partir d’expériences issues de notre détermination et de la justesse de notre aspiration. Nous découvrirons que la pratique de l’enseignement du Soutra du Lotus se réalise au-delà de nos idées et de notre compréhension intellectuelle, qu’elle est solidement reliée au monde vivant de l’Enseignement, à ces principes de base et à notre implication dans toutes les relations qui contribuent et ont contribué à notre existence.

Parlons plus concrètement des enseignements qui se manifesteront naturellement à notre conscience si nous pratiquons avec courage et détermination. Le Soutra répète sans cesse l’idée de notre potentiel d’éveil, de l’interdépendance et du principe des causes et des effets qui régissent la réalité de l’existence. Appliquons-nous ces principes à notre réalité ? Acceptons-nous l’idée que toutes les circonstances, toutes les relations, bonnes et mauvaises que nous rencontrons dans notre existence, ont un sens et des causes profondes, en lien avec notre propre humanité, celle de notre famille, de nos ancêtres ? Faire vivre l’Enseignement dans notre réalité permet de résoudre les obstacles karmiques : cela nécessite que nous nous impliquions avec reconnaissance dans tous les liens, et en particulier dans le lien avec les êtres qui sont à l’origine de notre existence, en souhaitant le bonheur de tous et en recherchant comment les aider à y parvenir. C’est un projet merveilleux.

Résoudre en profondeur, transformer la réalité est une entreprise exceptionnelle. Mettre en pratique l’Enseignement demande de développer, petit à petit, du courage, de la discipline, de la persévérance, etc. Le soutra affirme que c’est possible pour tous de devenir un être au service de l’évolution et du bonheur des autres. Il nous rappelle que c’est au sein de ces liens que nous trouverons les clés de notre purification, de notre propre sagesse et d’un bonheur profond. Les expériences réalisées dès que l’on essaie de s’impliquer selon cette méthode de pratique sont nos plus solides encouragements.

Prendre un tel projet pour les autres permet aussi d’élargir les capacités de notre esprit. Notre recherche nous entraîne d’abord à être plus attentifs aux autres, à nous intéresser sincèrement à eux. Elle nous amène à sortir de nos réactions émotionnelles et à nous interroger avec bienveillance sur l’état de telle ou telle personne, sur l’état de ses ancêtres, sur les causes de nos comportements, par exemple, celles des événements et des circonstances de notre existence.

Comment mieux voir ? Lors des réunions avec nos compagnons, écoutons simplement ce qui sort de leurs bouches, quels obstacles ils évoquent. Si nous avons le sentiment de n’être pas concernés par ces obstacles, rappelons-nous que nous sommes très ignorants de ce qui, profondément, nous lie à eux. Soyons curieux. Acceptons avec humilité de poser la question quand nous lisons le Soutra. Les expériences qui émanent d’une telle attitude sont souvent étonnantes : nous découvrons combien nous sommes proches de nos compagnons dans leurs obstacles et combien il est important que nous, les premiers, nous nous efforcions de nous transformer pour leur ouvrir la voie. Dès lors,attentifs aux obstacles de nos compagnons, aux questions qui sont les leurs, nous apprenons à les garder en nous quand nous sommes dans la réalité de la vie, avec les autres, et nous observons mieux le monde alentour.

Nos expériences passées, basées sur l’Enseignement, nous ont enseigné que le bonheur est lié à l’évolution de notre conscience et de notre humanité. Notre sujet devient donc alors : comment inspirer nos compagnons, comment leur donner le goût du progrès, de leur propre éveil, leur donner envie de suivre ce chemin ? Nos prises de conscience sont le fruit d’une véritable recherche, d’un dialogue avec les autres au terme duquel souvent l’évidence apparaît, au-delà de tout ce qui a été échangé. S’interroger sans raideur, laisser les réponses apparaître, le moment venu, au-delà de notre pouvoir, c’est un vrai apprentissage ! Si l’on se met dans l’action, animé du sens généreux de rechercher pour les autres, comme le Reiyukai nous y invite, les expériences éclairent petit à petit le chemin. Il faut s’exercer, comme dans tout apprentissage. Sans vouloir à tout prix avoir des résultats. Travailler sur la qualité de notre esprit, sur le sens de nos actions, faire des efforts concrets, cela est en notre pouvoir. Les résultats ne nous appartiennent pas.