Après 20 années passées à l’étranger et à Paris, Emmanuelle est revenue dans sa région d’origine où elle a obtenu un poste en septembre 2016. Elle a fait alors une rencontre déterminante…
En quoi la rencontre avec Sabine a-t-elle été déterminante ?
Je me suis rapidement sentie en grande confiance dans cette nouvelle vie, comme protégée. Et j’étais encore tout à fait confiante, quand on m’a appris que je devrais demander un autre poste pour la rentrée scolaire suivante. Fait incroyable, celui que je rêvais d’occuper a été créé au même moment. Et c’est dès ma prise de fonctions dans un poste où je devais accompagner des enfants allophones et des enfants du Voyage que j’ai rencontrée Sabine. Les circonstances de notre rencontre ont été assez étonnantes : elle cherchait une intervenante pour une formation sur les élèves allophones et avait demandé la veille devant son autel à accueillir un nouveau compagnon de pratique ; je cherchais un service, et je suis entrée « par erreur » dans son bureau. Durant les jours suivants, nous nous sommes croisées à plusieurs reprises dans des magasins (ce qui ne nous est plus jamais arrivé depuis) et nous nous sommes rendu compte que nous prenions le même train pour deux réunions, distinctes, mais aux mêmes heures et au même endroit. Nous avons donc voyagé ensemble, elle m’a proposé l’Enseignement et je suis devenue sa compagne. J’avais donc trouvé ma nouvelle mission à la fois sur le plan professionnel et spirituel.
Dans quelle mesure la découverte du bouddhisme de l’Amitié Spirituelle a-t-elle modifié ta pratique professionnelle ?
En commençant à réciter le Soutra et à partager l’Enseignement, j’ai tout de suite vérifié que la réalité bougeait autrement qu’avec ma seule volonté, et je l’ai d’abord observé dans la sphère de ma vie personnelle, dans laquelle des situations se sont dénouées étonnamment. La grande découverte de ma première année de pratique, c’est donc que tout bouge en fonction de la qualité de notre esprit et des actions qu’on met en place en ce sens. Je l’ai ensuite vérifié dans la sphère de mon travail, où je dois trouver des solutions adaptées à des jeunes étrangers qui arrivent sur notre territoire, souvent en souffrance. Je crois être d’une nature bienveillante mais je remarque que cette qualité s’accroît quand je demande, lors des récitations, à être encouragée dans cette intention, et qu’elle se diffuse et gagne aussi les autres. Quand je suis sans solution pour un adolescent, c’est souvent devant mon autel que je suis inspirée d’une issue à laquelle je n’avais pas pensé, et qui se vérifie. Aussi, malgré l’ampleur de la tâche – créer seule un dispositif pour l’ensemble du département – tout se déroule avec simplicité et fluidité. Mes relations avec ma hiérarchie sont bienveillantes et mes demandes aboutissent favorablement. Les liens avec nos partenaires se tissent rapidement et efficacement ; et nous avons ainsi pu, par exemple, sécuriser le parcours des Mineurs Non Accompagnés : les scolariser et même trouver un toit à ceux qui n’étaient pas pris en charge par le conseil départemental. Quant à l’équipe des enseignants que j’accompagne, elle est soudée et solidaire. La recherche que je conduis avec mes compagnons m’est précieuse pour travailler avec eux. Les temps de formation avec cette équipe sont riches, et les échanges d’analyses de nos pratiques respectives sont aussi d’une grande qualité d’expression et d’écoute, toujours dans une bienveillance amicale.
Mais je savais que tout ne se passait pas aussi bien partout. Aussi, au début du premier confinement, j’ai proposé à mes quatre collègues des autres départements de l’académie de nous retrouver régulièrement par visio, pour prendre enfin le temps d’échanger sur nos pratiques. Je souhaitais alors que nous bénéficiions toutes des actions menées par l’une ou par l’autre afin d’activer les leviers adéquats déjà testés par l’une d’entre nous. Cela a permis peu à peu à mes homologues de ne plus considérer leurs missions comme spécifiquement territoriales, d’élargir leur point de vue et d’accepter qu’on travaille ensemble avec une vision globale. . Cela m’a permis aussi de mesurer le travail accompli avec mon équipe , où pourtant le CASNAV est bien plus récent, et de diffuser dans toute l’académie les meilleures initiatives mises en place. J’ai ainsi le sentiment de participer à la fois à l’amélioration de la prise en charge de notre public scolaire et des conditions de travail de mes collègues. J’observe aussi que la qualité des échanges au sein des assemblées de pratique se transfère, rejaillit dans mes groupes de travail.
Quel enseignement as-tu eu l’occasion de vérifier dans le cadre de cette mission ?
Cela ne me rend pas moins humble pour autant, car bien que je sois dévouée et consciencieuse dans mon travail, beaucoup de ces choses ne sont pas arrivées par mon seul pouvoir. On entend que, lorsqu’on agit avec le souhait du progrès des autres, le Monde spirituel nous accompagne. Ma dernière expérience en témoigne. Affectée par un article paru dans un journal, article qui stigmatisait les Gens du Voyage et divulguait des informations erronées quant à la scolarisation de leurs enfants, et convaincue aussi de l’inutilité d’un droit de réponse, je me demandais quelles actions mettre en place pour valoriser la scolarisation du plus grand nombre et encourager les autres. J’ai déposé cette demande auprès du monde spirituel. Peu de temps après, un imprimeur m’a spontanément contactée pour me proposer de travailler avec lui dans ce sens, à l’édition d’un livre destiné aux Gens du Voyage !
Je suis extrêmement reconnaissante pour tout cela et souhaite sincèrement mettre encore plus l’Enseignement au cœur de ma vie, et œuvrer, à mon niveau, à l’amélioration de la société dans laquelle je vis.