L'AMITIÉ SPIRITUELLE: LE CHEMIN VERS LA TRANSFORMATION

Une vie tournée vers la réalisation de l’enseignement

Je suis membre du bouddhisme de lAmitié Spirituelle depuis plusieurs années, et chaque matin, je lis le Soûtra avec cette question à lesprit :  « Comment puis-je évoluer en tant qu’être humain dans la relation avec les autres, et quai-je à apprendre dans ces relations ? »

 

Ce matin-là, ma demande était différente : en effet, quelques jours auparavant, j’avais entendu lors d’une réunion au Centre : « Pourquoi est-ce nécessaire pour un être humain de s’engager sur le chemin du bouddhisme de l’Amitié Spirituelle ? ».Pouvoir répondre à cette question m’avait paru essentiel. Je savais qu’il ne pouvait s’agir d’une réponse intellectuelle mais qu’elle apparaîtrait  au travers des actions conscientes que propose le bouddhisme de l’Amitié Spirituelle .

 Nettoyer les conditionnements négatifs de nos familles

 Ce jour-là, précisément, j’ai vécu sur mon lieu professionnel,  une situation qui m’a à la fois mise en colère et attristée. J’ai assisté au renvoi d’un salarié dont l’attitude avait entravé gravement le bon fonctionnement du service. J’ai alors exprimé mon sentiment aux quelques personnes de l’encadrement qui étaient présentes : « Ce garçon doit beaucoup souffrir, son attitude a sûrement des raisons d’être. Où sont ces parents ? Font-ils quelque chose pour leur fils ? » On m’a répondu qu’à 37 ans, il  était temps qu’il se prenne en charge. Ma colère a redoublé.

Ce soir-là, lorsque j’ai récité le Soûtra, cette scène m’est revenue en mémoire « Pourquoi suis-je en colère ? Pourquoi, avais-je aujourd’hui la capacité de considérer ce garçon autrement ? » Avant de pratiquer, une telle situation me serait apparue sans intérêt. Comme mes collègues, je me serais contentée de juger l’attitude de ce garçon. Ce progrès dans ma conscience et mon humanité qui était apparu clairement lors de cet événement m’ont ramené à ma demande du matin. J’ai ressenti cela comme un encouragement réel à continuer ce chemin.

 Prendre conscience du lien qui nous relie à nos ancêtres

 Dès le début de ma pratique, lors des réunions j’ai entendu que nous étions le résultat de nos parents et de nos ancêtres, que cette relation verticale était extrêmement importante, et qu’en réalisant cet enseignement, on pouvait nettoyer des conditionnements négatifs de nos familles afin de ne pas les reproduire. Comme moi, vous savez que nous ne sommes pas nés dans un chou, mais avons-nous réellement conscience de ce lien ? Faisons-nous la relation entre nous, notre état d’existence et celui de nos parents, grands-parents….. ? Personnellement, je n’avais pas  conscience de ce lien vertical, je pensais qu’un être humain devenu adulte commençait une vie autonome et j’avais la certitude que la mienne serait différente de celle de mes parents. J’ai accompli les actions que me proposait mes aînés de pratique avec le souhait de voir le sens profond de cet enseignement. J’ai encouragé des personnes à s’engager sur ce chemin et je les ai accompagnées afin que l’on puisse progresser ensemble.  J’ai vu alors apparaître dans ma réalité et celle de mes compagnons des aspects que j’ignorais totalement : des états de colère, de violence, de l’ego. J’ai vu, en particulier dans la relation de couple, à quel point j’avais le sentiment d’être parfaite et combien j’attendais des autres qu’ils changent. J’ai pris conscience du jugement souvent négatif que j’avais porté sur la façon dont mes parents nous avaient éduqués mes frère et sœurs et moi-même. J’ai réalisé chez mes propres enfants, si différents l’un de l’autre, la souffrance que j’avais engendrée à vouloir qu’ils progressent selon mon idée. J’avais entendu, sans le comprendre d’abord, que  nos compagnons de pratique ne se relient pas à nous par hasard.

 Développer le cœur dont parle le Soûtra

 Grâce aux multiples expériences vécues avec eux, j’ai perçu la réalité de cet enseignement . Je ne peux plus renier ce lien : celui, filial, qui m’unit aux membres de ma famille et à mes ancêtres et celui, tout aussi profond qui me relie à mes compagnes et compagnons de pratique. Désormais, je ne peux plus m’illusionner sur les relations qui se sont construites autour de moi. Consciente de l’interrelation qui m’unit aux autres, je m’efforce d’accepter les situations quelles qu’elles soient, et de créer en moi l’aspiration à transformer les aspects limités qui les produisent. Je sais que, pour un être humain, les relations constituent le terrain pour évoluer. En vivant avec cette nouvelle conscience, je vois qu’il est possible de développer un autre cœur : celui dont il est question dans le Soûtra.  Nous avons la plupart du temps une idée de ce que signifie l’expression « avoir du cœur pour les autres » mais nous le réalisons vraiment lorsque, motivés par l’envie de leur permettre d’ évoluer, nous tentons de garder un cœur égal pour nos compagnes et compagnons, malgré les obstacles et les états qu’eux et nous-mêmes traversons. La nature même de ce cœur nous apparaît bien différente alors de ce que nous avions imaginé. Dans le processus de la pratique, nous développons, sans l’avoir voulu, des qualités- appelées perfections dans le Soûtra, de patience, de persévérance, de courage et de générosité etc.

De la remise en cause à la transformation

Ainsi, nous nous transformons. Nous  en avons fait l’expérience récemment à la maison. Tous les jeudis soirs, notre maison est ouverte pour partager la lecture du Soûtra avec les personnes qui le souhaitent. C’est un moment important : je m’y prépare donc intérieurement afin de voir et d’apprendre. Ce soir-là, alors qu’un de nos compagnons exprimait qu’il faisait dorénavant preuve de davantage de discernement dans ses relations, un autre membre a pris conscience de son propre manque de discernement : elle avait en effet le jour-même rencontré une de ses compagnes de pratique. Durant cet échange, elle avait beaucoup parlé sans voir que la personne ne l’écoutait pas . Elle ne s’était pas posée la question de savoir si ce qu’elle transmettait était adapté ou non à son interlocutrice. Cette prise de conscience était intéressante car elle l’encourageait à corriger l’esprit avec lequel elle accomplissait les différentes actions de pratique. À ce moment-là, je me suis vue trois mois plus tôt dans la même situation. Je me suis rappelée avoir pensé alors que  mon interlocuteur n’avait pas assez envie d’entendre et que son souhait de progresser n’était pas assez grand. Que d’interprétations !!! J’ai vraiment regretté mon étroitesse d’esprit et souhaité profondément développer une considération plus grande pour les autres. Curieusement, alors que je n’avais pas revu cette personne depuis, je l’ai rencontré deux jours plus tard. J’avais un esprit très différent et j’étais heureuse de pouvoir échanger de nouveau avec elle. Là encore, j’ai vérifié la puissance de l’enseignement : seul le souhait sincère d’évoluer en relation avec les autres, accompagné d’un repentir actif et conscient de nos limites transforme à la fois notre réalité intérieure et extérieure.

 Pour en revenir à l’expérience vécue au travail, je perçois notre peu d’humanité envers les gens qui nous entourent. Sans cesse, nos jugements, notre conscience limitée nous entravent et nous empêchent de rentrer en relation de manière juste avec les autres. Grâce aux transformations étonnantes dont j’ai été le témoin chez certains compagnons de pratique, je vois que chaque être humain porte en lui ce potentiel et a la capacité de  devenir un être humain extraordinaire. Nous ne pouvons pas espérer construire un monde de paix  sans réaliser cet enseignement.

Notre vie est merveilleuse et intéressante depuis que Jean-Yves et moi avons pris la détermination de progresser, selon l’enseignement du bouddhisme de l’Amitié Spirituelle, avec les compagnons qui partagent ce chemin avec nous. 

Christine